Le temps de l'amour,
le temps de la réflexion
Le dernier film de Basile Carré-Agostini est une œuvre joyeuse. Un hymne à la vie. Un couple en est le héros. Pas un homme et une femme, non, un couple dans son unité. Sociologues à la retraite mais le pied alerte et la parole facile. Monique et Michel Pinçon-Charlot ont choisi comme terrain de prédilection pour leurs recherches La grande bourgeoisie. Est-ce un si grand hasard ? Lorsque l’on connaît le fossé qui existe entre Michel, fils d’ouvrier, et Monique descendante de la grande bourgeoisie provinciale ? Un fossé comblé par les convictions du couple. Une revanche de classe ? Un besoin révolutionnaire. Combien de fois ce mot est-il prononcé dans le documentaire ? Basile filme dans la solitude de sa réalisation. Seul, caméra en main, il capte les silences, les temps immobiles, la parole, l’engagement de Monique et Michel à la retraite confortable. Ils pourraient rester sagement dans leur pavillon de banlieue, se sentir apaisés. Mais non, ils ont la bougeotte et s’enflamment à la moindre étincelle sociale. Il faut être présents. Là où cela se passe. Comprendre ce qui semble inexplicable. Ils arpentent les manifestations des gilets jaunes comme explorateurs du social. Ils rencontrent les ouvriers de l’usine Ford de Blanquefort. Leurs voix sont posées. Comme dans le pavillon où ils échangent. Le même ton, la même complicité, la même action. Basile Carré-Agostini filme avec retenue ce couple qui se prête à l’image. Une approche qui rend complice les protagonistes et le public. Une connivence que l’on retrouve dans les projections. Public présent, sourire aux lèvres. Un petit bonheur en somme. Le public se reconnaît dans cette simplicité du mot et de l’action, loin, très loin, de ce que véhicule l’imaginaire que l’on peut avoir du chercheur. Ici un crayon et un cahier suffit à faire le bonheur de Monique et Michel Pinçon-Charlot et du nôtre… La caméra stylo de Basile s’est jointe pour nous offrir un film qui possède la couleur de l’espoir.