Autant En Emporte le Temps

1940. Remise de l’Oscar du second rôle à Hatti McDaniel

« Chaque enregistrement a été détruit ou falsifié, chaque livre réécrit, chaque image a été repeinte, chaque statue et bâtiment de rue a été rebaptisé, chaque date a été modifiée. Et le processus se poursuit de jour en jour et minute après minute. L ‘histoire s’est arrêtée. Rien n’existe sauf un présent sans fin dans lequel le Parti a toujours raison. « 
George Orwell -1984
Le 22 juin aurait dû être une fête pour le cinéma. Pensez-donc, la réouverture des salles obscures après plus de deux mois et demi d’abstinence totale. Plonger à nouveau les yeux grands ouverts dans les films. Le REX à Paris, la plus grande et l’une des plus belles salles de la Capitale se faisait une beauté pour ouvrir ses écrans, avec cette idée géniale de profiter de l’éclaircie pour retrouver quelques monuments du cinéma. Autant en Emporte le Vent de Victor Fleming devait faire l’ouverture. Mais voilà, la Warner (détenteur des droits mondiaux) ayant peur pour ses fesses, et reconnaissons-le, ouvertement un poil démago, a renoncé à la diffusion du film. Il y a dans cette censure d’Autant en emporte le vent, film symbole, film mythique, une violation de l’esprit et du temps. Comme il en est de la mise à terre de statues, de plaques de rues que l’on veut rebaptiser au nom du souvenir. Voire débaptiser la salle Colbert de l’Assemblée nationale. Nier une réalité historique, c’est enclencher un processus de censure. L’onde de choc violente et inadmissible de la mort de George Floyd en est à l’origine. 8 mn 46 d’images qui ont changé les regards. Mais faut-il à ce point accepter la flagellation du repenti ? L’enjeu complexe est celui du citoyen dans son intégralité sociale devant la Nation. La censure n’a jamais été le fait des courageux. Elle transpire d’une forme de médiocrité. Celle de pressurer l’esprit. A cette peur qui nous renvoie à cette incapacité  à s’accepter soi-même. Autant en Emporte le Vent est un film inscrit dans l’histoire du 7e Art, aussi bien par l’aventure complexe de sa mise en place et sa réalisation que par le succès planétaire (encore aujourd’hui, il reste le films le plus vu et donc le plus rentable ! ). Cela n’empêche pas d’immenses zones d’ombres lors de sa sortie à Atlanta où les comédiens noirs, dont la grande comédienne afro-américaine Hattie McDaniel qui obtiendra en 1940 l’Oscar du second rôle pour Mama, n’ont pas pu pénétrer en salle en même temps que les acteurs blancs. Incompréhensible et douloureusement injuste. C’est aussi cela le cinéma cette inégalité raciale que les Etats-Unis ont longtemps cultivé. Ils ne sont pas les seuls. Nous le savons trop bien. Une œuvre aussi mineure soit-elle existe pour ce qu’elle représente, elle est inscrite dans le temps de sa réalisation et fige l’histoire, même pour un film d’époque. Il est donc important quelque soit la création produite qu’elle conserve son existence. Elle devient la représentation d’une époque donnée. D’une pensée, d’un choix. Retirer, même provisoirement Autant en Emporte le Vent de la programmation de HBO tout comme supprimer sa diffusion en salle en fait un film en résistance. 

June 22 should have been a celebration for the cinema. Think about it, the reopening of dark rooms after more than two and a half months of total abstinence. Dive into the movies again with your eyes wide open. The REX in Paris, the largest and one of the most beautiful cinemas in the capital, made a makeover to open its screens, with this brilliant idea of ​​taking advantage of the thinning to find some monuments of cinema. Gone with the Wind by Victor Fleming was to make the opening. But now, the Warner (holder of world rights) being afraid for her buttocks, and let’s face it, openly a little demago, has given up the diffusion of the film. In this censorship of Gone with the Wind, symbol film, mythical film, there is a violation of spirit and time. As it is the grounding of statues, street signs that we want to rename in the name of memory. Even rename the Colbert room of the National Assembly. To deny a historical reality is to initiate a process of censorship. The violent and unacceptable shock wave of the death of George Floyd is at the origin. 8 mn 46 of images which changed looks. But must we accept the flogging of the repentant at this point? The complex issue is that of the citizen in his social integrity before the Nation. Censorship has never been done by the brave. It transpires from a form of mediocrity. That of squeezing the mind. To this fear that sends us back to this inability to accept ourselves. Gone with the Wind is a film inscribed in the history of the 7th Art, as well by the complex adventure of its implementation and its realization as by planetary success (even today, it remains the most viewed film and therefore the most profitable!). That does not prevent immense gray areas at the time of its exit in Atlanta where the black actors, of which the great African-American actress Hattie McDaniel which will obtain in 1940 the Oscar of the supporting role for Mama, could not enter the room at the same time as the white actors. Incomprehensible and painfully unfair. This is also cinema that racial inequality that the United States has long cultivated. They are not the only ones. We know it all too well. A work as minor as it is for what it represents, it is inscribed in the time of its realization and freezes history, even for a period film. It is therefore important whatever the creation produced that it retains its existence. It becomes the representation of a given era. Of a thought, of a choice. Removing, even temporarily Gone with the Wind from HBO’s programming, just as suppressing its broadcast in theaters makes it a film in resistance.