États Généraux du Cinéma

Les absents ont toujours tort

JEUDI 6 OCTOBRE 2022. L’appel à des États généraux du cinéma a été entendu. Rappelons les chiffres du CNC. Le poids économique du cinéma et de l’audiovisuel est de 0,8 point du PIB et génère plus de 340 000 emplois directs et indirects. Ils étaient presque tous venus comme dirait la chanson, de Virginie Efira à Jacques Audiard, d’Agnès Jaoui à beaucoup d’autres, sans oublier les distributeurs, les cinéastes de la SRF et de l’ACID. Les scénaristes, les techniciens, les étudiants en cinéma, les journalistes spécialisés étaient du cortège mais aussi les producteurs, aux premiers rangs. Ils étaient presque tous là, même Jak Lang le patron de l’Institut du Monde arabe. Il a ressorti pour l’occasion le costume qui lui allait le mieux, celui de ministre de la Culture. Du petit lait ! On en aurait bien pris une tasse mais le temps bousculait déjà les tables rondes prévues. Le tourment teintait toutes les interventions. Un appel aux absents, ministre de Tutelle et le CNC dont les louanges avaient cette couleur que l’inquiétude donne aux mots. En effet, l’organisme semble avoir oublié sa feuille de route sur le chemin du temps. Trois thèmes :   “Insurmontable, la crise ? “, “Menaces sur la création” et “Quelles conséquences dans les salles ?”. Une agora digne de ce nom avec un espace important donné aux interventions qui reflétaient les inquiétudes annonciatrices d’un possible tremblement de terre. Le cinéma dans la trop rapide transformation économique de la dernière décennie en a oublié qu’il était le 7e Art. On peut toujours le rappeler, cela ne fait pas de mal mais l’oxygène manque. L’asphyxie politiquement programmée n’a d’autre but -que l’on voudrait indolore- que de gommer de l’industrie cinématographique internationale, cette exception française qui emmerde la terre entière mais que les cinéastes du monde entier nous envient. Cette fameuse redistribution des flux financiers afin d’alimenter tout l’éventail de la création (TSA) et particulièrement le cinéma d’auteur. Si les différentes assemblées sont d’accord pour que le système évolue, la ligne rouge à ne pas franchir reste bien l’EXCEPTION. Les absents ont toujours tort puisqu’ils étaient au centre des débats et des questions du public. Mais leurs oreilles bien présentes, soyons en sûrs. Les choix des diverses instances publiques sont claires : renforcement de  l’attractivité pour les tournages internationaux, volonté accrue de l’émergence de “champions nationaux” privilégiant un axe industriel, laissant la création sur le bord de la route. Une vision qui oriente les investissements vers les grands groupes et le metaverse (via le plan France 2030). Un choc d’une violence économique, un jeu de dominos avec un cinéma d’auteur indépendant percuté à tous les étages par les conséquences de la pandémie (fréquentation en berne, distributeurs très fragilisés, financement des productions de plus en plus aléatoire). “Nous ne sommes pas à l’abri d’un effondrement de la production et de la distribution” et donc de la fin d’un modèle, alerte la réalisatrice Marine Francen. Un vivier de talents fragilisé par un obscurantisme politique qui jette aux orties la défense de la création qui a survécu à des décennies.  L’appel à des États généraux du cinéma a dressé un état des lieux alarmant pour le cinéma d’auteur français mais également à l’évidence, pour quelque chose de beaucoup plus emblématique, celui de la culture au sens large. Un dernier chiffre pour la route, entre 25 et 30 % de spectateurs en moins depuis le début d’année.