Gindou 2022

Il y a d’abord la départementale 13, posée là, un double virage, une courbe déliée qui fractionne la ville en deux. Imposant la séparation des pouvoirs. Certainement une volonté du divin ! Mairie d’un côté, de l’autre, frontale, l’église romane St Barthélémy datant du XIIIe siècle. Village figé entre Cahors à 30 km et Cazals à un jet de pierre. Un point sur la carte, encore faut-il qu’elle soit d’Etat-Major. Gindou dans le Lot, ville de 400 âmes dont la jauge miraculeusement monte chaque année de plusieurs milliers d’habitants supplémentaires, comptabilisant près de 20 000 entrées sur la semaine des Rencontres. Trente-huit ans que cela dure. La cour de l’école résonne encore de cette première fois. Ici, le cinéma s’écrit avec un « C’ majuscule et sans particule. Dans l’égalité des genres. Un rendez-vous à cocher chaque année. La dernière semaine d’août pour être précis (à vos agendas 2023). Une fois le projecteur éteint, la dernière séance inscrite dans l’attente du public au petit matin que déjà les pensées vagabondent vers d’autres écrans. Ainsi vont les Rencontres à Gindou. La nostalgie ne fige pas le temps, elle renforce le futur. Gindou honore ceux qui ont construit sa mémoire. Pas de faux-semblant pour l’hommage à Guy Cavagnac (Le Soldat Laforêt). Sincèrement cinématographique. Tout comme l’a été Alain Guiraudie (L’Inconnu du lac, Rester vertical, ou encore son dernier film, Viens je t’emmène) dont les Rencontres fêtaient les retrouvailles avec ce réalisateur qui avait reçu un prix pour son troisième court métrage en 1995. Nous étions alors dans la dixième année des Rencontres. Tout était déjà écrit et surtout d’inscrire l’invité dans une rétrospective. Il faut du temps au temps, et trouver cet espace si particulier dans lequel se love le réalisateur. Août 2022 est le bon moment. Une réussite avec un public retrouvé qui dès 14h prenait à nouveau ses marques. Les coussins bariolés sous le bras, les matelas sur la tête à la recherche d’une place à réserver dans le théâtre de verdure (une agora de 700 places), d’un lieu dans l’herbe et même peut-être réussir à accrocher son hamac entre deux arbres… Alain Guiraudie en parfaite symbiose avec cette tribu était chez lui. N’a-t-il pas promis que l’année prochaine il rejoindrait la horde ? Ainsi va le cinéma en terre de Gindou, dans la fraternité des relations, des débats, face aux réalisateurs lors d’une tchatche, assis aux tables des espaces de restauration ou en déambulant à l’écoute des apéros-concerts qui ouvrent les séances du soir. Flâner à la librairie La Tartinerie de Sarrant. Le temps suspendu du 7e art à la mélodie d’un nickelharpa. Les guirlandes multicolores dans la nuit avancée rappelle ce Jour de fête, cher à Jacques Tati. Comment ne pas aimer le cinéma ? Le bonheur est là, à la découverte de ces films qui ont la longueur de leurs récits retrouvant ce tempo non formaté des origines.
On a beau revenir chaque année, la découverte nous titille toujours autant devant la qualité de la programmation. Les organisateurs n’y sont pas pour rien, naturellement, pas plus que la soixantaine de bénévoles qui butinent allègrement. Une ambiance à remercier, vos exercices nous ont été profitables.