JEFF LINDSAY

Un petit casse pour la route

C’est l’été. Certains partiront sur la route, d’autres feront un pas de côté. Peu importe la destination, proche ou lointaine, il est presque sûr que le bouquin que l’on trouvera entre les mains de beaucoup est le dernier ouvrage du prolifique Jeff Lindsay. Son personnage de Dexter avait aiguisé l’œil de plus d’un spectateur, donnant envie de découvrir les ouvrages dont était tirée la série. Il y aussi du bon, à vouloir trop d’images on se plonge dans les mots. Rien de tel que d’avoir entre les mains le dernier Lindsay. Vous allez jubiler. L’auteur ose un genre nombre de fois adapté au cinéma, et soyons en sûr, Riley tente l’impossible franchira aisément les portes d’un studio. Le thème du « Casse” se classe dans l’échelle du genre parmi les plus plébiscités par les lecteurs et les lectrices. Peut-être parce que la mécanique du braquage doit être parfaite et que l’on se pose la question : “comment le grain de sable  va gripper la machine ” ? Pour cette nouvelle aventure, Jeff Lindsay met sur les rails un nouveau personnage : Riley Wolfe, un monte-en-l’air à l’élégance du Gary Grant de La Main au collet d’Alfred Hitchcock. C’est un joueur. Comprenez que notre héros se lance des défis improbables. Il se prétend le meilleur du monde, il faut donc montrer au reste des terriens qu’impossible n’est pas Riley. Mais que serait un héros sans un teigneux à ses basques ? Frank Delgado, agent spécial du FBI, endosse avec perfidie le rôle. Il y a du “Javert” dans sa détermination à faire tomber Riley. Nous le savons, plus le méchant est réussi, meilleur est le héros. Comme un billard à trois bandes, il faut compléter le tableau, avec Monique, faussaire de talent trimbalant avec elle, quelques secrets familiaux aussi lourds que des boulets. Le tout servi avec une certaine sophistication teintée d’humour. On pense à L’Affaire Thomas Crown. La comparaison s’arrête là. Le roman n’en a pas besoin d’autre. La première aventure (qui, nous l’espérons, ne sera pas la dernière) peut commencer. C’est une histoire de gros cailloux. Il y a eu le Topkapi puis la Panthère rose sans oublier le collier de la Reine. Ici, il s’agit du Daryeyeh-E-Noor de la couronne iranienne qui sera exposé au musée privé des Eberhardt à Manhattan. Un prêt à l’occasion d’un échange interculturel entre les Etats-Unis et l’Iran. Une phrase suffit à comprendre l’enjeu et le plaisir non dissimulé de notre héros devant le défi qu’il s’est imposé et qu’il nous fait partager. Système de sécurité high-tech, une section des forces spéciales et les Gardiens de la Révolution iranienne. Que du beau linge pour le plus gros diamant du monde. Il est toujours important pour le lecteur d’essayer de trouver la faille, de se dire : qu’est-ce qui peut ne pas fonctionner ? L’inverse est tout aussi vrai. « Pourquoi ce type, au mental des plus grands héros de fiction, a-t-il tant de chance ? »L’héritage peut-être ? La bonne étoile certainement. Le hasard, pas vraiment. C’est peut-être à ce jour un des meilleurs romans de casse que l’on a pu lire. Les ingrédients sont tous là, pour passer un été à l’ombre du héros.