La boucle des Pieds Nickelés

Les aventures des Pieds Nickelés (1947) suivit du Trésor des Pieds Nickelés (1949) de Marcel Aboulker. On récidivera en 1964 sous le titre  Les Pieds Nickelés réalisé par Jean-Claude Chambon.  Mais retenons cette adaptation d’Emile Cohl (1917-1918) chez Éclair. Cette bande fut projetée dans le cadre de Ciné-Mémoire -2019 – à Épinay que vous pouvez découvrir. Restauré par le CNC.

Nous voilà privés de la Grande Boucle. Qu’à cela ne tienne. Découvrons donc cette aventure sportive sous le regard du cinéma et de la BD. Un personnage à part entière qui tient le haut de la scène pendant trois semaines. 
Pour nous accompagner, Les Pieds nickelés, indécrottables magouilleurs. Si le 7eme Art ignore les héros de la débrouille (quatre films en tout et pour tout). Films dont il faut reconnaître le manque d’inspiration. Ne faisons pas la fine bouche, on goutte malgré tout au plaisir d’un cinéma aujourd’hui totalement révolu. Les Pieds nickelés naissent d’un coup de crayon et d’une idée du dessinateur Forton, en 1908. Trois lascars qui auraient pu croiser le chemin de leur aîné, l’aristocrate et élégant voleur Arsène Lupin. La gouaille du populaire en plus, pas mondains pour deux sous les Pieds nickelés s’invitent au nom du peuple. Ce qui ne gâche rien. Croquignol, Ribouldingue et Filochard commencent leurs aventures dans l’Épatant grâce au pionnier de la bande dessinée française, Louis Forton. Aussi irrévérencieux qu’anarchistes, nos héros construisent cette vie rêvée des gavroches. Rien ne les arrêtera même pas le décès dans l’anonymat total de leur créateur. C’est René Pellos qui reprendra le trait en accentuant le caractère des personnages. Le trio débarque pour la première fois dans le Tour de France en 1948 pour y apporter sa subversion. C’est aussi l’année de la sortie du film Cinq Tulipes rouges de Jean Stelli. Un polar qui intègre le peloton tout au long de la Grande Boucle. Les Pieds nickelés, eux, appuient sur la pédale, truquent les courses, voire deviennent organisateurs pour leurs seuls profits. Huit albums seront consacrés au Tour. Pourquoi autant ? Simplement parce que René Pellos est caricaturiste et s’exerce dans la presse sportive comme dessinateur. Personne ne possède comme lui le talent de croquer la tronche des coureurs en souffrance qu’il parsème au gré des cases. Le cinéma est en embuscade et sort régulièrement du peloton offrant aux spectateurs quelques films sur la Grande Boucle. Notons que le premier film date de 1925 : Le Roi de la Pédale de Maurice Champreux alors que déjà sévissait Les Pieds nickelés sur bande. Si le cinéma s’intéresse au Tour de France, c’est avant tout pour l’héroïsme devant la difficulté. Les visages torturés de douleur, déformés par la fatigue comme autant de caricatures. Retenons plusieurs films comme Hardi les gars (1931) de Maurice Champreux où un facteur pour l’amour de sa belle s’engage pour la Grande Boucle… Un personnage qui rappelle un certain François, le facteur ! Mais aussi Pour le Maillot jaune (1939) de Jean Stelli avec Albert Préjean ainsi que deux films qui évoquent Les six jours de Paris, une course aujourd’hui disparue : Le Prince des six jours (1936) de Robert Vernay et un film allemand Rivaux sur la piste (1932) de Serge de Poligny. La Grande Boucle, les Pieds nickelés la sillonneront jusqu’en 1983 pour un ultime album Les Pieds nickelés font le Tour puis les héros fatigués raccrocheront définitivement leurs musettes. Cela n’empêchera pas le cinéma de caracoler en tête avec plusieurs films qu’il faut redécouvrir comme Les Cracks (1968) d’Alex Joffé avec Bourvil, Parpaillon (1993) de Luc Moullet et le film d’animation de Sylvain Chomet Les Triplettes de Belleville (2003). Le documentaire du réalisateur américain The Armstrong Lie (2013). Le roi déchu de la petite reine, Lance Armstrong, qui avec d’autres affaires de dopage discréditèrent le Tour qui n’en perdit par pour autant toute sa popularité. Mais le mal était fait et le doute s’installa. Si nous devions terminer l’étape, il y a un film qui, sans avoir fait le grand Tour, avait en son temps conquis le cœur des spectateurs des bords de route : Le Triporteur, réalisé en 1957 par Jacques Pinoteau et interprété par Darry Cowl. Mais si on ne devait retenir qu’un film qui, du début à la fin, résume l’univers des Pieds nickelés, il s’agirait sans conteste de l’Aventure, c’est l’Aventure de Claude Lelouch.