Le Feu Sacré

Et Prométhée vola le feu aux dieux pour le donner aux hommes. Le feu est sacré. Protecteur et nourricier. Il est la valeur de l’Homme. Celui qui le dompte et martèle le fer dans la chaleur des fours. Les légendes mythologiques sont montées au front pour défendre cette confrérie du feu. Trois cents salariés de l’aciérie Ascoval dans le Nord. Prométhée est à leur côté. Il veillera. Pendant un an, ils vont lutter pour sauver leur boulot. Ils ont la tenace des Titans et la caméra d’Eric Guéret, proche, très proche de la lutte, nous offre un portrait tout en « respect » de ces hommes et femmes aux regards fiers de ce qu’ils sont. Entre doute et combat, sans résignation d’aucune sorte ils sont là, même dans le désespoir. Unis. L’humanité est ainsi filmée, dans le respect humain. Un film qui respire l’aventure de ces ouvriers, cadres et direction : tous sur le même bateau à voguer à vue. Sans boussole mais avec leur seule détermination à sauver l’usine. La violence de l’économie est comme les coup de tabac en mer, à tout moment le rafiot peut couler. Mais non ! Les flibustiers sont là, tenant le cap, l’espoir au ventre. Il en faut des luttes pour rester digne, face à la mondialisation où l’Etat a de moins en moins de poids devant la « souveraineté Industrielle ». On a beau être un fleuron moderne de la sidérurgie, rentable, au pays du minerai de fer, les industriels n’ont que faire de l’empreinte historique et des luttes d’honneur menées en terre nordique. L’histoire sociale n’est pas leur tasse de thé. Ils délocalisent en Chine entraînant dans leurs sillage, la destruction de près de 600 000 emplois sur moins de dix ans. En sera-t-il de même de l’aciérie Ascoval basée à Saint-Saulve près de Valencienne ?  Alchimistes qui transforment la ferraille en lingots d’acier de haute performance.  Entreprise éco-responsable et ouvriers fiers de l’être. La maison mère Vallourec n’a que faire de ces lilliputiens. Il faut fermer l’usine pour d’autres productivités plus rentables. Toujours plus. Nous voilà prévenus. Eric Guéret, caméra au poing, va suivre cette lutte étalée sur 70 jours de tournage pour accompagner ces employés, syndicalistes et patron dans cette course contre la mort. Le film nous relate, à la façon d’un thriller maîtrisé, les rebondissements jusqu’au coup de sifflet final de cette aventure humaine qui mène à l’espoir. Le filmage du réalisateur est à la hauteur des ambitions du film. Le partage et l’unité. La détermination et la fierté sont dans le regard. Humain, terriblement citoyen. C’est la réussite qu’il faut partager en salles.