Les INCOMPRISES

Niki de Saint Phalle

Les Incomprises (éditions Michel Lafon). Cela pourrait être le titre d’un film à sketches des années 70. Comme toute idée, elle prend sa source sur une page blanche. Puis le délié du tracé en continu apparaît. Une empreinte stylisée, peinte à l’encre de chine symbolisant en deux voire trois traits subtils le portrait d’une des 11 invitées de l’ouvrage de Laura El Makki et Pierre Grillet. Ainsi commence par l’image, le verbe. Les Incomprises. Un titre donc. Une complicité rebelle, mise en partage avec le lecteur. Ce sont des prénoms que l’on lit en toute convivialité, avec  familiarité pour certaines. Figures en résistance qui dessinent une démarche consentie, sans a priori. Nous y sommes conviés. Le banquet est ouvert, chacune conjuguant le mot Liberté avec convictions et doutes que le dessinateur, Atiq Rahimi, a su brosser. Une fois quitté le pinceau, il met un point final à la préface. La table est dressée. Laura El Makki et Pierre Grillet en maîtres de cérémonie nous invitent à découvrir les pages de leurs écriture cinématographique coordonnée par Ollivier Pourriol (auteur de Éloge du mauvais geste, Une fille, un flingue). Onze femmes que notre mémoire sélective a stylisé comme d’étrange icônes mythologiques. Ne cherchez pas ce qu’il y a de commun entre Niki de Saint Phalle et Amy Winehouse, entre Louise Michel et Adèle Hugo.  Laissez-vous plutôt porter par le verbe qui vous invite à la découverte. Ne sommes-nous pas là pour partager ? Pourquoi ne pas tourner les pages et prendre rendez-vous avec Billy Holiday, Françoise Giroud, mais aussi avec Simone Weil, Sabina Spielrein. Tant d’itinéraires, de réflexions que l’on a trop rapidement chassés de notre mémoire asphyxiée. On en est là. Embrumés par les vapeurs médiatiques, nous oublions. La mémoire de l’instant brouille les pistes. Que reste-t-il du temps ? Sinon un livre comme objet de résistance. Les Incomprises sont nombreuses et souvent révoltées. Sylvia Plath, Emily Dickinson, Marilyn Monroe complètent le banquet. Les traces n’ont pas encore tout à fait disparues dans l’oubli, mais l’absence devient avec le temps une empreinte floue que l’on a du mal à discerner. Laura El Makki et Pierre Grillet nous proposent de figer le temps. L’instant de la lecture. Le banquet est ouvert à celles et ceux qui le désirent. Il y a dans cette démarche comme une renaissance, celle de penser à juste titre que toutes les femmes sont Marianne.