Le film est court et intense. Et pourtant le temps est là, dans l’immobilité des blessures de guerre. We are soldiers de Svitlana Smirnova aurait tout aussi bien s’appeler, Dmytro, Oleksii, Anatolii et les autres, un titre de chanson. Trois soldats revenant du conflit entre la Russie et l’Ukraine. Trois blessés. Trois chemins. La réalisatrice pense-t-elle tout de suite à réaliser un documentaire alors qu’elle se porte volontaire comme infirmière à l’hôpital de Kiev ? Le courage de ses patients l’encouragea-t-elle à se décider ? A témoigner caméra en main ? Le cinéma est aussi là pour ça. Le documentaire se met en place avec une équipe réduite. Par sa rapidité d’exécution, la réalisatrice réussit à capter le temps. Qui semble si long à nos trois protagonistes. Ainsi va la vie des blessés de guerre. La caméra de Svitlana Smirnova se faufile entre les couloirs en contre-jour, les chambres, l’extérieur, les promenades dans le parc, échanges dans la conviction. Ici, en Ukraine un blessé de guerre est un héros. Un citoyen que l’on respecte. Il n’y a pas d’indifférence. La longue séquence dans le musée de guerre témoigne de l’engagement de la population autour de ses soldats. La réalisatrice a su capter les témoignages dans les silences. Les paroles sont économes, précises, sobres dans les descriptions, variées dans les souvenirs à reconstruire. On parle aussi pour cela. Du temps qui passe entre deux représentations musicales, une équipe TV pour un reportage… Et après ? Après l’hôpital ? Comme autant d’hommes blessés. La question se pose. La volonté est là, pas forcément pour retourner au front (encore que) mais pour se reconstruire. Le film est optimiste. Jusque dans le choix des chaussures qui viendront compléter les prothèses des protagonistes. C’est un film à hauteur humaine, sans misérabilisme. Le cinéma de Svitlana Smirnova nous propose une réflexion sur l’engagement, sans noircir le trait.