Little Big Horn

Derek Woolfenden membre fondateur de l’association HOME CINEMA

Nous voilà de retour à la case chance ? Le Monopoly pour toute politique ! On aurait aimé souffler un peu, se dire que tout cela allait pouvoir s’arranger. Que La Clef, dernier cinéma associatif de Paris reprendrait sa programmation heureuse. Que nini ! On s’acharne. On veut la peau du bison. Mais les mohicans (qui ne sont pas les derniers) ont la carapace à l’épreuve des coups bas. Le Covid peut-être un bon allié pour ceux qui pensent pouvoir s’offrir le lieu dans l’indifférence ! Ce n’est pas parce que l’on n’en parle plus que la résistance baisse les bras, pas plus que  les soutiens. Jacques Audiard, Agnès Jaoui, Bertrand Bonello sont montés en première ligne… La Société des Réalisateurs de Films (SRF) a elle aussi haussé le ton. Des cinéastes, vidéastes, journalistes de cinéma, sans parler du public, souvent au premier rang, sont également droits debout. Un rempart contre le mercantilisme de bas-étage. Il semblerait bien qu’une nouvelle fois, on veuille clouer le bec à ce cinéma. Lui retirer la clé d’entrée et changer les serrures. Les bailleurs de fonds s’acharnent à jouer un mauvais remake lorsqu’ils décident de faire main basse sur un immeuble. Fransceco Rosi (1) ne nous contredira certainement pas. Tous les coups sont permis et surtout celui de la patience. N’est-ce pas l’une des qualité de l’oiseau de proie ? Attendre et encore attendre, le temps fera son œuvre pensent les propriétaires des murs. L’association Home Cinéma qui tient à bout de bras le lieu n’a pas besoin de potion magique pour garder le punch devant les légionnaires du groupe SOS, dirigé par le centurion Jean-Marc Borello. L’homme est un produit de la République en Marche. L’appétit du groupe SOS est gargantuesque. Il est malin  le promoteur. Ce qui l’intéresse c’est une image et les murs. Le rachat du cinéma La Clef comme une identité en lutte. Quoi de plus palpitant que de mettre dans sa besace un bastion en résistance en s’autoproclamant « sauveur ». Soyons professionnels, pourrait-on penser, ne laissons pas un lieu si emblématique, chargé d’histoire, aux mains de quelques rêveurs… C’est bien vrai ! Les rêves ont quelque chose de révolutionnaire que même les psy ne peuvent pas contrôler. Alors un promoteur !  On comprend l’enjeu dont le cinéma La Clef n’est que la partie émergée de l’iceberg. Plutôt que de soutenir des lieux de création, il est préférable de scléroser les espaces indépendants par quelques manœuvres de sauvetage ayant la couleur de la culture, le goût de la culture, mais qui ne sont rien d’autre qu’une main mise sur la parole citoyenne. Il reste toujours une carte dans la manche d’un Doc Holliday. Même si celle-ci est souvent pipée. Une chance encore ? La préemption de la ville sur le lieu ? Figer l’assaut en entendant les tambours de l’espoir.
(1) Main basse sur la ville, 1963