Vincent Price, qui d’autre ? Doit-on se poser la question ? Effectivement, quel autre comédien pour endosser le sadisme avoué de l’inquisiteur Matthew Hopkins, fidèle à l’Angleterre alors que le roi Charles II est en guerre contre Cromwell. Nous sommes en l’an 1645. Matthew Hopkins se voulant le bras droit de l’église se sent pousser des ailes. Il se croit l’exécuteur testamentaire de l’église. Lui, le fourbe, l’usurpateur, il prend sa fonction tellement au sérieux qu’il en devient crédible. Personne d’ailleurs ne le remettra en cause, pas avant qu’il ait trucide après un jugement expéditif, sorciers, sorcières, et autres suppôts de Satan. Au bûcher, tout ce beau monde. Brûler ce qui est impur. Dieu reconnaîtra les siens. Ainsi va dans le meilleur des mondes la pacification des terres chrétiennes. Le film de Michael Reeves (Seulement trois films au compteur. Il décèdera brutalement à l’âge de 25 ans d’une overdose) est adapté librement du roman de Ronald Bassett, inspiré d’une nouvelle d’Edgar Allan Poe. Une biographie de l’inquisiteur qui fit exécuter plus de 300 personnes, des femmes principalement. On aurait pu croire le film sorti tout droit de l’esthétisme de la Hammer. Mais non, la firme au lion (MGM) a pris un malin plaisir à se régaler des scènes de tortures et autres bûchers. Que demander de plus sinon voir Vincent Price, au visage de marbre, infliger les sentences sans recours. Le monstre au sang froid est de retour entre Le Cercueil vivant et La Cité sous la mer. Le voilà, cruel à souhait jusqu’au jour où il croise un prêtre et sa nièce sur lesquels il jette l’anathème. Mais la jeune femme a un fiancé, un soldat qui jure vengeance. Le chasseur devient gibier. Bien au-delà de la dénonciation, Le Grand Inquisiteur est avant tout un film horrifique même si les thèmes rappellent quelques westerns comme Johnny Guitare, La Colline des potences ou encore Le Sergent noir. Lorsque l’on pointe du doigt l’inquisition, les références sont nombreuses. Matthew Hopkins qui sema la terreur de 1644 à 1647 en Angleterre et son acolyte John Stearne nous rappellent naturellement ses fous de Dieux qui sévissent quelque part sur terre. Le troisième et dernier film de Michael Reeves vogue entre la série B et l’hommage à son maître, Don Siegel. Prendre le film pour ce qu’il est sans essayer de le grandir inutilement. Un film se suffit à lui-même malgré les nombreux changements imposés par les producteurs, charcutant la vision du jeune réalisateur. Malgré les aléas du remontage, du changement de titre et de la mésentente sur le plateau avec Vincent Price, le film aura son petit succès dont ne profitera pas le réalisateur. Remercions les éditions BQLH de fouiller dans les greniers de l’histoire cinématographique pour nous faire partager leurs trésors.
Filmographie de Michaël Reeves
1966 : The She Beat, 1967 : The Sorcerers (La créature invisible), 1968 : Witchfinder General (Le grand inquisiteur)