Partenaires

Jean-Pierre Marielle et Nicole Garcia dans Partenaires, un film de Claude d’Anna chez www.capuseen.com

LES TROIS COUPS

Le 7e Art et le théâtre sont des inséparables. La raison en est simple. Le cinéma « primitif », vierge de tout code s’inspira de la scène et du regard du spectateur. La légende voudrait que très rapidement on découvrit l’axe idéal de la prise de vue. L’emplacement de la caméra qui serait celui du spectateur parfaitement placé. Le milieu du cinquième rang fut retenu. La caméra à hauteur du  regard. Légende ou pas, cela n’a pas beaucoup d’importance puisqu’elle s’inscrit dans l’histoire. Depuis longtemps, le cinquième rang a été redonné au public. Mais le cinéma, lui, s’est enivré de l’atmosphère des loges, des coulisses, des lumières, des répétitions… Du jeu. Le film du réalisateur Claude d’Anna s’imprègne de l’atmosphère d’un théâtre, à quelques minutes de la représentation. Nicole Garcia (Marion) donne la réplique à Jean-Pierre Marielle (Gabriel), le couple, face à Michel Galabru et Michel Duchaussoy, partenaires. Un couple qui se déchire en coulisses dans la réalité du jeu comme on les imagine sur scène, face au public. Du théâtre de boulevard à la tragédie. De la réalité de couple à la comédie, il n’y a qu’un pas, celui d’entrer en scène. Un drame qui fracture le couple. Tout comme les membres de la troupe, nous sommes témoins de la déflagration silencieuse. A croire que l’on assiste à une répétition générale et que la réalité est sur scène. Le double « JE » comme dirait aisément un psychanalyste bien connu. Ce toboggan qui fonce vers l’abîme rappelle la puissance scénique d’un opéra. Ce n’est pas un hasard, naturellement. Claude d’Anna a l’Opéra chevillé au corps. On lui doit notamment un Salomé à Palerme,  La Bohème à la Fenice de Venise, Macbeth et Fidélio au Teatro Massimo Bellini de Catane. Des expériences dramaturgiques qui l’ont nourri. Nous sommes ici dans un espace restreint. La plus grande partie du film est un huis-clos qui a comme décor la loge que se partage le couple. Un opéra verbal joué dans l’intimité de la déchirure. Le lieu n’est naturellement pas anodin. C’est ici que l’on s’approprie les personnages, devant la glace, au maquillage, en revêtant son costume, en répétant les dialogues, avoir le mot en bouche et se sentir l’autre, vraisemblable sur scène pour vivre. Le film de Claude d’Anna nous offre un jeu à trois bandes, les personnages que le couple Marion et Gabriel interprètent, ensuite l’interprétation de Nicole Garcia et Jean-Pierre Marielle endossant leur personnage respectif et enfin les comédiens eux-même offrant au film ce moment si particulier qui nous fait penser avec bonheur à Bergman.  Un moment partagé avec les comédiens qui nous fait dire que l’on ne va jamais assez au théâtre. Merci au film de nous le rappeler.