l’énergie positive des Dieux

Dieu est un rocker. Enfin, on l’espère sinon le Paradis serait bien fade. L’Énergie positive des Dieux, le film de Laetitia Møller est un rock brut. Punk. Rimbaud comme protecteur. Comprenez que l’on s’en empare comme un pavé lancé à la face d’un monde sclérosé. Le documentaire dégage les méninges. Remet à sa place le son des Sex Pistols. Une déferlante que l’on doit au groupe Astéréotypie formé de quatre musiciens autistes, sous le regard de Christophe l’Huillier, un éducateur passionné d’art brut. Stanislas, Yohann, Aurélien et Kevin forment cette bande à la rage au ventre. Défiant toute représentation. On déchire les mots et fait hurler les basses. “Ils n’interprétaient pas la musique, ils l’incarnaient “. Un coup de poing dans l’estomac qui a donné naissance au film. L’émotion à l’état sauvage. L’art brut du son. C’est ce qui nous manque bigrement aujourd’hui et qu’a réussi à transcrire à l’image la réalisatrice, Laetitia Møller. Prendre la caméra et écrire. Nous ne sommes pas loin du désir d’André Bazin. Filmer au rythme du temps, du battement du cœur. Car il en a fallu du temps pour arriver à se faire accepter, à poser la caméra, sans pour autant apprivoiser le groupe, se laisser soi-même accepter et enfin filmer. Non pas l’autisme présent mais un groupe de rock. Pas de thérapie musicale, de curiosité ethnographique face à ses extra-musicaux qui revendiquent une proposition artistique à la hauteur de leurs exigences. Tout le moteur du documentaire est là ! Un relationnel entre Christophe, éducateur et musicien et le groupe, être à l’écoute des délires. Un langage à traduire. Malaxer les mots et les vibratos là où coule la vie qui n’est pas un long fleuve si tranquille. Toujours sur le fil du rasoir, en équilibre, fragile naturellement, particulièrement lors des concerts où le dérapage incontrôlé peut devenir force créatrice. Filmer Astéréotypie, c’est accepter l’inconfort et l’émotion tribale qui nous tenaille, celle des âges farouches. On ne sort du film qu’avec cette énergie “sauvage” que l’on a laissée trop longtemps au vestiaire de la normalisation. Le film de Laetitia Møller percute socialement et musicalement. Une énergie positive qui nous rapproche des divinités oubliées. C’est du rock, du punk, que dire sinon de la rage. Cela fait du bien. Et comme un petit bonheur ne vient jamais seul, le dernier microsillon du groupe, “Aucun mec ne ressemble à Brad Pitt dans la Drôme” est dans les bacs !